Rachel
Elle s’appelait Rachel. Elle était ma grand-mère, ma grand-mère maternelle. Je l’ai peu connue. Elle était magnifique de beauté, de dignité, de solitude aussi.
Ma mère m’en a peu parlé. Elle-même a été élevée par sa grand-mère pour que sa mère puisse travailler.
Cet héritage féminin m’a toujours interpelée. Ma grand-mère parlait patois, un patois du Périgord que je ne connaissais pas. Lorsque je lui apportais des friandises, du chocolat, elle s’empressait de les cacher sous son matelas, qu’elle se trouve chez elle ou chez ma tante, sa fille aînée. J’ai compris instinctivement, très jeune, qu’elle avait subi des manques, de nombreux manques, qu’il lui serait désormais impossible de compenser. Elle s’était murée dans le silence, dans la solitude.
Ce magnifique château cacherait il de sombres secrets?
Un jour, ma mère m’a annoncé qu’elle était partie pour le grand voyage. Et cette femme incroyable, un dimanche, a pris un bain, elle qui n’avait pas l’eau courante ; qui allait au puits sur la place pour chercher de l’eau à l’aide d’un seau.
Elle a mis ses vêtements du dimanche. Puis elle est allée rendre visite à ses amis proches.
Elle est rentrée chez elle dans la soirée. Elle a fermé ses volets, s’est allongée, habillée, sur son lit.
Le lendemain matin, les volets sont restés fermés. Puis l’après midi.
Une voisine est venue frapper à la porte, puis d’autres. Ils sont entrés dans sa petite maison.
Elle s’était endormie pour l’éternité. Elle avait fait ses adieux.
J’espère, grand-mère, que ton âme vagabonde virevolte dans des paysages somptueux qui t’apportent la paix, la douceur et la joie qui t’ont tant manqué sur Terre.
Comments